« Les comédies musicales, c’est trop niais ! » Voilà ce que bougonne Jules quand vous lui sortez votre DVD fétiche, celui où les jeunes filles virevoltent dans les rues et chantent leur amour au levant les yeux au ciel. Bon…nous, les films sucrés et légers, on adore ça, pas vrai ?
ça nous redonne le sourire et c’est le principal… Mais il est tout de même bon de savoir qu’il existe certaines comédies musicales dotées d’une véritable intrigue et abordant des thèmes « de société » : West Side Story…
Vous vous souvenez de l’admirable chanson Maria Maria de Santana ? « Maria, Maria, she reminds me of a west side story… » (« Elle me rappelle une histoire du côté ouest… »), et bien redécouvrez le classique, la Grande référence…un film de 1961, réalisé par Jérôme Robbins et Robert Wise.
« Maria, Maria… » fredonne(lui aussi !) le pauvre Tony (Richard Beymer, un tantinet fade…) en pensant à la jolie brune (Nathalie Wood) rencontrée tantôt au bal. Mais la petite Maria est Portoricaine tandis que Tony est Américain (d’origine étrangère mais il est né aux USA). Leur amour est donc sérieusement entravé par la rivalité mortelle qui oppose les Sharks et les Jets, deux bandes de voyous dirigées respectivement par l’ombrageux Bernardo (frère de Maria) et le farouche Riff (meilleur ami de Tony). Vous suivez ?
En clair c’est Roméo et Juliette dans l’Amérique des années 50, cette Amérique faussement tranquille au sein de laquelle la jeunesse cherche à se faire une place coûte que coûte, quitte à sortir les canifs pour les faire briller en pleine lumière…
Bon, Jules ne pourra s’empêcher des grommeler : « C’est bien joli mais toujours aussi niais et une fois de plus les jeunes filles virevoltent dans les rues et chantent leur amour au levant les yeux au ciel… ». Certes. Et les jeunes garçons font de même, ce qui peut paraître assez ridicule aux yeux des téléspectateurs du Troisième Millénaire, habitués à des chorégraphies disons…un peu plus viriles. Mais qu’importe.
Derrière les entrechats et les petits sauts de biche, se cache le désespoir. Celui d’une jeunesse désœuvrée et incomprise. Le film se focalise sur les tensions qui agitent les bandes de rue, ces tensions engendrant violence et vandalisme…ça vous dit quelque chose ?
La savoureuse et espiègle chanson Gee, Officer Krupke résume bien l’incapacité de la société à gérer cette jeunesse problématique.
Le choc entre nouveaux et anciens immigrés permet d’évoquer les problèmes de racisme, d’ intolérance et de mixité culturelle. L’ambiguïté de l’idée d’’intégration est illustrée, avec humour, par une scène de « battle » verbale entre Portoricaines et Portoricains : les filles font l’apologie de l’American way of life tandis que les garçons déconstruisent leurs arguments avec ironie. Les répliques fusent, les couples tournoient, c’est vivant, rythmé et corrosif ! (mention spéciale à l’énergique et rondelette Anita –jouée par Rita Moreno)
[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=Qy6wo2wpT2k&feature=related[/youtube] un petit extrait de America« Les Filles : J’ aime être en Amérique / Tout me convient en Amérique / Tout est libre en Amérique
Fille : J’aurai ma propre machine à laver / Garçon : Mais auras-tu encore quelque chose à laver ?
Fille : L’ industrie explose en Amérique… / Garçon : 12 dans une pièce, en Amérique
Fille : J’aurai un appartement avec terrasse… / Garçon : Quand tu auras perdu ton accent !
Fille : La vie peut être épatante en Amérique… / Garçon : Si tu sais te battre, en Amérique !
Fille : La vie est parfaite en Amérique… / Garçon : Si vous êtes blanc, en Amérique ! »
Enfin, l’Amour est au centre du film….Car c’est l’Amour qui foudroie les deux jeunes premiers, c’est l’Amour qui fait tourner les têtes, rend les jouvencelles coquettes et fofolles.
La chanson I feel pretty ne peut que vous ravir, un vrai régal rose bonbon : Maria, amoureuse et épanouie, se sent soudain terriblement « jolie » et ne se prive pas de le clamer sur tous les toits.
Et c’est encore l’Amour qui donne aux amants la force d’affronter leurs clans respectifs et de transgresser les règles, de combattre l’ignorance et la haine…